Poster : Hors les murs avec Laurent Lacotte
Création d'un collectif, conception d'affiches, installation dans les rues de Sotteville.
Dans le cadre de l’exposition Posters au Frac Normandie Rouen (situé à Sotteville), l’atelier de sérigraphie de Yann Owens, en partenariat avec le Frac, a initié et a accueilli un workshop de Laurent Lacotte. L’intention était simple : que cette exposition Posters permette de faire émerger dans les rues de Sotteville des affiches. Pour sa communication visuelle, le FRAC n’utilise et ne produit pas d’affiches, il semblait légitime, en association avec EDGAR, que ce questionnement sur l’affiche contemporaine provoque la création d’images pour la rue.
Dans sa pratique, Laurent Lacotte ne sépare pas l’affiche de ses autres « actions-media » (installation, sculptures..) et il tient à intervenir le plus possible dans le contexte urbain et le domaine public. Il œuvre avec des moyens économiques, rudimentaires, très souvent accessibles et transportables dans son sac-à-dos.
Laurent Lacotte est artiste. L’exposition Posters présente -à deux exceptions près- des « posters » d’artistes (issus des collections publiques), l’ESADHaR sur son site Le Havre se destine à former de futur(s) graphistes. Il s’agissait en-deçà pour les étudiants (qu’il soit en art ou en design graphique) de penser à toutes ses cases et à ses définitions…. dans le cadre précis d’un format papier de 50 par 65 cm.
Lors de sa première journée d’intervention, Laurent Lacotte informe d’une volonté : la fondation d’un collectif réunissant tous les étudiants inscrits au workshop. Ainsi, allaient se fondre les affirmations égotiques et les idées de projets pensées au préalable du workshop. Pour chacun des étudiants, il a fallu se retirer de ses propres logiques graphiques pour penser (en) collectif. Le nom du collectif émerge, Sara et Tony essayent, généré par un ordinateur à partir de lettres des prénoms des étudiants. Dans la logique du travail Laurent Lacotte, l’idée d’affiche générique s’impose, une affiche où l’image sera éliminée afin de ne garder que le noir et blanc du texte et la force des mots. Tout est pensé démocratiquement (du nom du collectif au choix de la typographie). Tout est énoncé, débattu, puis donne lieu à un vote. Le troisième jour, suite à une revue de presse (sélection et lectures à voix haute d’articles issus de quotidiens datant du 8 mars et choisis par les étudiants) sont composées sept phrases. Ces phrases ne restituent que des échos brouillés pourtant directs, des mots allusifs à l’actualité. Ces sentences ont été pensées par un(e) participant(e), elles ont été relues, corrigées, critiquées de façon collégiale. Des mises en pages ont été élaborées et validées toujours par un système de vote. Ces sept phrases vont donner lieu à sept affiches sérigraphiées (plus une affiche signature), et suite à un repérage opéré le deuxième jour dans les rues de Sotteville, elles sont collées en série ou de façon isolée sur le chemin qui mène du métro au Frac (dans la semaine précédent le vernissage).
Les affiches à la tonalité minimaliste se démarquent et interpellent du fait de leur simplicité. Dans le contexte urbain et en prise direct avec le réel (le quotidien des passants et leur source textuel, l’actualité), elles posent un acte de lecture étranger aux pratiques habituelles dans la rue. Les huit affiches (tirées à 50 exemplaires chacune) se collent et parasitent les autres agglomérats d’affiches ou les surfaces multicolores des murs. Anormalement blanches, ces affiches suggèrent, apostrophent plus qu’elles énoncent. L’intervention pensée dans l’espace urbain, se veut légère. Elle n’est pas signée, accompagnée par un cartel explicatif émanant d’une institution culturelle et n’a aucune forme visible de promotion (d’une école ou de personnalités). L’action par l’affichage ne contrarie pas ouvertement, mais peut se doter de connotations plus sérieuses, si on (le citadin, comme l’étudiant) le souhaite…. nouer des corrélations dans ce contexte d’élections présidentielles. D’ailleurs, le collectif pourrait prendre d’autres formes, inventer d’autres actions ultérieurement, continuer à questionner l’écriture, la liberté, la rue et les noirs et les blancs de la création.
http://www.laurentlacotte.com